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Fictions lesbiennes E.G.O.
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5 janvier 2020

TCHAT.com - Chapitre 7

Chapitre 7

 

Il m’a fallu du temps avant de partir du travail ce soir-là. Je ne sais pas combien de minutes ou d’heures se sont écoulées avant que je ne réalise ce qui s’était passé. Je m’étais réfugiée dans un coin de mon bureau, cachée derrière ma plante, les stores fermés. Les genoux recroquevillés sur moi-même, ma tête entre mes jambes, j’ai attendu, patienté…j’étais désarmée et terrifiée. Puis je me suis levée et rhabillée. J’ai mis mon manteau, fermée les boutons, mes doigts tremblotaient et après avoir mis mon sac à main sur l’épaule je me suis dirigée vers la porte de mon bureau.

 

Là encore je ne sais pas combien de minutes se sont déroulées avant que je n’arrive à ouvrir la porte. Juste le temps que mon cœur retrouve son rythme, juste le temps que ma main arrête de trembler avant de la déverrouiller.

 

Juste le temps…

 

Je n’ai pas pris l’ascenseur.

 

Arrivée à mon domicile, tous mes gestes étaient robotisés. J’avais l’impression de ne plus faire partie de mon corps. J’avais l’impression d’avoir perdu quelque chose en moi. Je me suis déshabillée et me mis sous la douche. J’ai monté la température de l’eau au point où ma peau devint écarlate. Il fallait que je me frotte longtemps et intensément pour faire disparaitre ses traces sur moi.

 

Et je ne sais pas combien de temps je suis restée sous l’eau mais peu importe le temps, j’avais l’impression de sentir toujours son odeur, de le sentir sur moi.

 

Je me suis mise au lit tout habillée et remontée la couette à son maximum.

 

Cette nuit-là je n’ai pas dormi.

 

Cette nuit-là….

 

**********

 

Lorsque j’arrive devant l’entrée du bâtiment, je mets un instant à me décider à rentrer. Refermant ma poigne sur la hanse de mon sac à main, je fais les quelques pas restants. Je passe devant l’ascenseur sans même un regard vers celui-ci et me dirige directement vers les escaliers.

 

Monter 8 étages ne me fait pas…plus peur.

 

J’arrive tant bien que mal en haut. Les descendre est nettement plus facile que les monter. Je suis essoufflée mais j’ai réussi, c’est déjà ça !

 

J’ouvre mes mails et commence à faire le tri lorsque je vois surgir dans mon bureau Lucie.

 

-          Ça va ma belle ?

 

Elle dépose devant moi un café chaud et s’assied tout en croisant les jambes.

 

-          Ça va.

 

Ma voix est plutôt fébrile. Je n’ai jamais su mentir et pour éviter qu’elle ne remarque quoique ce soit je racle ma gorge comme pour chasser le chat qui s’y trouve.

 

-          On mange ensemble ce midi ? me demande-t-elle après avoir pris une gorgée de son nectar

-          Bien sûr

-          J’ai plein de choses à te raconter

 

Et moi si tu savais !

 

-          C’est vrai ?

-          Oh oui…bon j’en dis pas plus je garde tout ça pour tout à l’heure.

 

Elle se lève et se dirige vers la sortie.

 

-          Au fait, j’aime bien ton petit foulard, c’est nouveau ?

 

Je porte une main à mon cou et lui réponds :

 

-          Non mais je ne l’avais jamais mis.

-          Ça te va bien.

 

Un sourire plus tard et elle s’éclipse.

 

Mes doigts caressent toujours le foulard à mon cou et cela me remémore ce matin.

 

Je ne m’étais pas regardé dans le miroir après la douche et lorsqu’au réveil je suis allée dans la salle de bain je suis restée interdite. Des traces bleutées jonchaient mon cou. J’avais essayé de camoufler cela avec un peu de fond de teint mais rien n’y faisait. Alors en farfouillant dans mes affaires j’avais trouvé ce foulard, il faut dire que j’avais hésité avec un col roulé mais au travail cela aurait paru suspect. Alors ce foulard était la solution au problème. Malgré tout, ce textile me rappelait que trop sa main et je n’avais qu’une hâte, sortir d’ici pour l’enlever.

 

Ce foulard me servait à camoufler tout cela, mais il était là aussi pour me rappeler ce qu’il s’était passé.

 

J’avais honte.

 

J’ai eu ma réunion journalière avec Marvin et Monica. Le travail était fini. Vraiment très bonne réalisation des publicités. Ils avaient fait tout cela dans les temps et j’en étais ravie. Au moins une bonne chose dans tout ce qui se passait dans ma vie à l’heure actuelle. Voir leur bonne humeur et leur sourire me faisait du bien.

 

L’heure du repas arriva bien vite et tant mieux. Je n’avais envie que d’une seule chose : rentrer chez moi.

 

Lucie ne fit que parler. Un vrai moulin à paroles. Elle me parlait surtout de sa relation avec Fred. Ils étaient ensemble depuis peu mais ça fusionnait comme un bouchon avec son stylo. Ils étaient heureux, c’était le principal. Ils s’imaginaient déjà vivre ensemble mais Lucie restait raisonnable à ce sujet.

 

-          Tu es d’accord avec moi ? C’est un peu tôt non ? me demande-t-elle

-          Si par un peu tôt tu veux dire 2 semaines, je te confirme que c’est tôt oui.

-          Et oui c’est ce que je lui ai dit, mais il est tellement pressé…heureusement pas pour tout, elle accentue sa phrase avec un clin d’œil comme si je n’avais pas compris le rapprochement.

 

Je pense faire une tête bizarre, penser à une scène de sexe me dégoute car elle ajoute.

 

-          Excuse…ne parlons plus de ça. Alors toi ça en est ou avec tu sais qui ?

 

Je n’avais pas pensé à elle depuis hier ou je l’ai vu avec SA COPINE et puis avec tout ce qui s’était passé…

 

-          On ne se parle plus comme ça au moins c’est clair.

 

Et pourtant, j’aurai tellement besoin de lui parler de ce qui m’est arrivée, de me confier. J’aimerais tant retrouver Miss_QUEEN, nos échanges, ses mots…qu’elle me donne le sourire, qu’elle me parle tout simplement…

 

Elle prend le temps de la réflexion.

 

-          Tu devrais quand même essayer de lui en toucher un mot.

-          Elle ne m’écoutera pas !

-          Et tu baisses les bras ?

 

Elle me regarde d’un air de dire bouge-toi.

 

-          Non mais…

-          Mais quoi ? elle hausse la voix

 

Mais… elle m’a jeté comme une mal propre, elle a une copine, j’ai été harcelé, agressé, j’ai envie de hurler et de tout envoyer balader.

 

Je prends sur moi, je respire profondément.

 

-          D’accord je lui parlerai…

 

Je dis plus ça pour que l’on change de sujet sinon je sais très bien qu’elle ne m’aurait pas lâché.

 

Elle pose son dos sur le dossier de la chaise et d’un sourire vainqueur me dit :

 

-          Je te retrouve enfin…je n’aime pas voir ma Madie triste.

 

Je lui fais un sourire pour la réconforter mais heureusement qu’elle n’a pas vu l’état de ma serviette sur mes genoux qui est en lambeau, elle aurait pris peur.

 

**********

 

Je prends mon dossier sous le bras et une grande inspiration puis rentre dans son bureau après avoir attendu son aval. Elle lève à peine le nez comme à son accoutumé. Et aujourd’hui, cela a tendance à m’exaspérer plus qu’un autre jour. Autant je prenais sur moi mais, depuis hier soir, je n’ai plus envie, j’ai envie de hurler. Je dépose donc le dossier sur son bureau comme d’habitude et reste planter devant elle. J’ai envie qu’elle me regarde, j’ai envie qu’elle me fasse face enfin.

Je vois très bien à sa posture et à sa façon de faire que cela l’agace, car elle dépose ses lunettes d’une telle façon qui me fait comprendre qu’elle n’est pas d’humeur.

 

Comme d’habitude !!!

 

Elle n’a pas besoin de parler, ses lèvres se pincent.

 

-          Est-ce que je pourrais vous parler ?

 

Ma voix est calme. Je pensais que j’allais avoir une voix plus fébrile et bien non et tant mieux.

 

-          Je n’ai pas le temps, rétorque-t’elle sèchement

-          Ça ne prendra pas longtemps…

 

Je fais un pas vers son bureau.

 

-          Pas maintenant !

 

Qu’est-ce que j’ai cru ?

 

Je commence à faire marche arrière et puis quelque chose se déclenche en moi. Un je ne sais quoi qui me fait faire demi-tour.

 

-          Ecoutez…

 

Elle ne lève pas la tête.

 

Et merde !

 

-          Ecoute, j’en ai marre de cette situation. Ça fait une semaine que je supporte que tu me parles mal, que tu sois agressive envers moi…alors ok je savais qui tu étais depuis quelque temps mais je n’ai jamais voulu que ça se passe comme ça. Tout ça, c’est vraiment une coïncidence et tu me l’as assez fait payer. Si j’avais voulu te faire du mal ou me moquer de toi ou autre, je ne sais pas à quoi tu penses mais tu peux voir que ce n’était vraiment pas le cas. J’étais juste contente de parler avec toi et je pensais que toi aussi. Faut croire que non. Alors si vraiment je te dégoute tant, vire-moi ça sera plus simple.

 

Je fais un pas vers la sortie et me retourne au niveau de la porte :

 

-          N’oublie pas, c’est toi qui est venue me parler sur le site, pas moi !

 

Elle me regarde avec dans les yeux un mélange de mi-colère mi-étonnée.

 

Je repars un peu plus légère même si je ne pensais pas dire ça. Je m’imaginais plus lui dire qu’elle me manquait, à croire que mon cerveau en avait décidé autrement.

 

J’ai ruminé tout l’après-midi les mots que je lui avais sortis. Je lui ai vraiment dit de me virer ? Mais qu’est-ce qui m’a pris ? Je devrais peut-être aller la voir et m’excuser ? Mais qu’est-ce que je raconte ? Je ne m’excuserai de rien. Ce n’est pas moi qui suis en tort dans cette histoire et si elle avait voulu juste m’écouter…c’est sa faute !

 

Si je me le répète plusieurs fois je commencerai à y croire non ?!

 

Pfff

 

J’aimerais tant lui parler et retrouver notre complicité. Ce n’était que virtuel mais ça ne changeait rien à ce que je ressentais. Elle me faisait rire, elle m’apaisait, elle me réconfortait.

 

Je regarde ma montre, 18h00. Elle est peut-être encore là. Je me lève pour aller voir dans son bureau, faut que je lui dise ce que je ressens pour elle. Mais avant d’arriver à destination, j’entends une voix que je reconnaitrais entre mille…LUI. Je fais demi-tour rapidement, pars récupérer mes affaires dans mon bureau et m’en vais au plus vite de ce bâtiment.

 

Mes jambes toutes flageolantes m’ont porté à l’extérieur où le temps est encore désastreux …le reflet de moi-même on dirait. Il pleut à grosses gouttes et sentir l’eau tomber sur mon visage me donne comme l’impression de vivre, d’exister.

 

Je reste sous la pluie battante quelques minutes. La lumière de la ville éclaire les rues, le bruit des voitures se dispersent, mon cœur ralentit reprenant son rythme habituel.

 

Je ferme les yeux le temps d’un moment mais le bruit d’un klaxon me fait me retourner.

 

Les gens sont inconscients en voiture surtout par un temps pareil pensais-je.

 

Il est l’heure de rentrer. Je commence à marcher pour rejoindre ma voiture tout en regardant l’intérieur du bâtiment. Je m’arrête net en la voyant sortir de l’ascenseur. Je la vois saluer le vigile puis regarder à l’extérieur. Elle attrape son téléphone, le regarde et le repose dans sa poche de manteau.

 

C’est le moment ou jamais Madie. Écris-lui !

 

J’attrape rapidement mon téléphone et envoie un message : « Tu me manques… »

 

Mon cœur reprend son rythme effréné, ma respiration se fait rapide, ma bouche devient sèche malgré l’air ambiant.

 

Est-ce qu’elle va ouvrir le message ?

 

Que va-t-elle en penser ?

 

Je n’aurai pas dû lui écrire…et pourtant j’espère.

 

Je la vois sortir son téléphone. Elle voit que je viens de lui écrire. Elle regarde de part et d’autres du hall puis examine à nouveau le téléphone. Malgré la pluie qui me rentre dans les yeux je distingue qu’elle ne remballe pas de suite son téléphone. Elle le regarde un long moment.

 

J’aimerais savoir ce qu’elle pense.

 

Sa tête se tourne à gauche et elle range rapidement son téléphone dans sa poche.

 

C’est foutu !

 

Je reprends ma respiration, j’ai l’impression d’être resté en apnée durant tout ce temps.

 

Et je la vois elle, sa petite amie, arriver avec un parapluie orange. Mais qui porte du orange à notre époque ?! Elle s’approche de Théa et la prend dans ses bras.

 

Je suis dégoutée.

 

Au même moment, Théa croise mon regard et ne me lâche pas des yeux. Enlaçant toujours sa copine, elle me fixe. Que pense-t-elle ? Est-ce que j’ai signé mon arrêt de mort ? Elle m’avait dit de ne jamais lui écrire et de l’oublier.

 

Je la vois partir bras dessus bras dessous et moi je reste plantée là.

 

**********

 

Je dois avoir une tête horrible. Je n’ai pas réussi à dormir à nouveau. A chaque fois que je fermais les yeux, je le voyais lui et sa façon de me regarder, sa façon de sourire…

 

J’ai encore mis mon foulard parce que les traces légèrement bleutées d’hier deviennent noires. Encore un signe qui me rappelle trop bien cette épreuve.

 

Oui, une épreuve et il me faut absolument la surmonter. Si je me laisse aller je n’arriverai plus à me contrôler. Je ne veux pas tomber dans une spirale à laquelle je ne pourrais peut-être pas me relever. Je sais que j’ai un mental assez fort, je m’en suis rendue compte au fil des années et même hier soir en les voyant toutes les deux mais j’ai peur.

 

Oui j’ai peur.

 

J’ai tout installé dans la salle de réunion. Le projecteur est en place. Les maquettes également. J’attends que Marvin, Monica viennent avec l’ordinateur. Normalement les personnes représentant CHAMIZEL devraient arriver vers 9h30. J’imagine que Mme LEGRAND ira les accueillir et les mènera directement ici. Contrairement à d’habitude je ne stresse pas. En fait, je m’en fou. Je connais mon projet et je sais que nous avons fait du bon travail mais je m’en fou.

 

Oui je préfère l’appeler Mme LEGRAND, cela met une distance entre elle et moi. Elle restera Madame Madame et j’abandonne l’option de retrouver un jour Miss_QUEEN. Ça me fait mal au cœur mais c’est comme ça.

 

9h15, Marvin et Monica arrivent dans la salle, ordinateur sous le bras et installent tout cela.

 

-          Parfait, le powerpoint fonctionne, dit Marvin en faisant des tests. Tu peux éteindre la lumière Monica pour voir comment ça rend ?

 

Elle s’exécute. On regarde quelques diapos défiler.

 

-          Pas mal, dis-je, tu peux mettre la musique avec pour voir sur la diapo 15 ?

 

Il avance rapidement jusqu’à la diapositive 15 et le résultat est vraiment sympa.

 

-          Super, bon boulot vraiment.

 

Les deux me regardent en souriant.

 

-          Bon, on a tout !

 

Je fais un dernier point sur tout ce qui se trouve devant nous.

 

Je récapitule un à un les points que je vais devoir mentionner feuilletant rapidement mon calepin.

 

Marvin se redresse précipitamment et ajuste son costard. C’est le signe qu’ils arrivent. Il nous rejoint au pas de course et nous nous positionnons tel des militaires attendant les ordres.

 

Mme LEGRAND passe en premier nous saluant de la tête mais je ne la regarde pas, mes yeux sont dans le vide. Puis vinrent les personnes de CHAMIZEL, deux hommes d’environ 50 ans ainsi qu’une femme de 35 ans je dirais. Tout le monde s’installe autour de la table et je me poste face à eux.

 

Allez c’est parti.

 

-          Madame, Messieurs, je…

 

Je n’ai pas le temps de finir qu’IL rentre dans la pièce. Mais qu’est-ce qu’il fait là ?

 

-          Excusez-moi pour mon retard, une obligation professionnelle.

 

Mme LEGRAND pince ses lèvres signe qu’elle n’est pas très contente qu’il arrive en retard.

 

Monica fait une drôle de tête lorsqu’il vient s’asseoir à côté d’elle.

 

Et moi je manque de m’évanouir.

 

-          Mademoiselle DANVERS…

 

Mais qu’est-ce qu’il fait là ?

 

-          Mademoiselle DANVERS ? répète plus fort Mme LEGRAND.

 

Je refais surface et la regarde.

 

-          Vous pouvez reprendre…

 

Ah oui…ok

 

Reste concentrée…focalise toi simplement sur ta prestation…inspire…expire.

 

1h plus tard, j’ai enfin terminé. Je n’ai pas bégayé une seule fois, Marvin et Monica ont été super dans leur interprétation de la marque. Le projet a été mené jusqu’au bout et c’est déjà une réussite.

 

Malgré tout j’attends le retour de CHAMIZEL. Je ne suis pas stressée par contre j’en vois une qui s’impatiente. Madame LEGRAND bouge sa jambe au sol nerveusement. Elle n’a peut-être pas aimé…ce n’est pas elle qui doit aimer mais eux ! Même si son avis a beaucoup d’importance et qu’en règle générale elle est dans le mile. Elle a suivi le projet de A à Z, par contre pour moi c’était de A à M…donc si elle n’est pas contente c’est son problème. Elle avait cas me mêler à tout ça malgré notre conflit.

 

Attendez…

 

Pourquoi je m’embrouille toute seule ?

 

CHAMIZEL n’a pas encore dit un seul mot et je me parle à moi-même.

 

Je devrais aller consulter. Je pense que cette agression me fait perdre les pédales.

 

J’attends donc debout, face à eux. Personne ne bouge. Les 3 personnes se regardent et s’en échanger un seul mot la dame prend la parole :

 

-          Je pense que nous ne pouvions pas mieux attendre de votre part

 

Je regarde ma chef et sa mâchoire se serre, ses maxillaires se contractent et ses yeux deviennent plus noirs que d’habitude. Marvin et Monica s’enfoncent un peu plus dans le fauteuil. Moi je reste à ma place déçue. Je m’imagine déjà recevoir un soufflon après tout ça.

Ta carrière est finie ma vieille, va falloir faire avec.

 

La dame reprend :

 

-          C’est tout simplement…

 

Je suis suspendue à ses lèvres, j’attends qu’elle donne le coup de grâce.

 

-          Parfait !

 

Pardon ?

 

Tout le monde se redresse, se tenant bien plus droit sur leur assise et les yeux s’écarquillent.

 

-          Oui parfait, pour ma part je n’ai rien à redire.

 

Les deux hommes acquiescent de la tête.

 

Je respire à nouveau ayant retenu malgré moi mon souffle jusqu’à présent. Je viens m’asseoir sur le premier fauteuil que je trouve le temps de reprendre mes esprits. J’avais imaginé le pire mais j’aurai dû avoir plus confiance en moi. J’avais confiance pourtant mais il a suffi d’une phrase pour que tout bascule. Dans ce milieu, on ne sait jamais à quoi s’attendre car les clients sont de plus en plus exigeants et ont souvent des idées bien précises de ce qu’ils veulent.

 

J’avais dit que je ne stressais pas, que je m’en foutais, faut croire que non vu ma réaction.

 

Je regarde du coin de l’œil ma chef en train de discuter avec les 3 personnes et en profite pour classer les quelques feuilles devant moi.

 

-          Je vous présente Madie DANVERS qui est à l’origine du projet.

 

Je lève la tête au moment même où j’entends mon nom et me met debout très rapidement.

 

-          J’ai vraiment adoré votre prestation, me dit la femme de CHAMIZEL

 

Adoré est un grand mot, elle aurait pu simplement me dire aimé ou apprécié.

 

-          Vous avez compris les fondements de notre marque. Je suis vraiment ravie de faire équipe avec vous.

-          Avec plaisir mais le travail ne me revient à moi seule, mes collaborateurs ont vraiment fait un travail formidable.

-          Je n’en doute pas et modeste avec cela, ajoute-t-elle avec un grand sourire.

 

Elle reprend la discussion avec Madame Madame et je perds le fil de cette dernière lorsque je vois l’Autre s’approcher de Monica. Mon regard ne peut s’empêcher de le fixer pendant qu’il lui passe une main dans le dos, elle déglutit difficilement. Je sens bien qu’elle n’est pas à l’aise. Elle cherche Marvin du regard mais ce dernier est sur son téléphone.

 

Je sens un coup de coude me rentrer dans les côtes.

 

Aie !

 

Le regard noir de ma chef m’indique qu’elle me parle et que je n’ai rien écouté.

 

-          Mme DOLLY nous proposait de s’occuper d’un second projet qu’ils n’ont pas encore développé mais qu’ils aimeraient mettre sur le marché prochainement.

-          Oui, j’aimerais beaucoup votre implication dans notre projet.

-          Bien entendu, répondis-je, nous pouvons voir cela ensemble ou si vous le désirez voir cela avec Madame LEGRAND, à votre convenance ?

 

Un sourire s’étire sur son visage et réponds :

 

-          Avec plaisir, je prendrai contact avec vous prochainement.

 

Elle regarde Madame Madame et enchaine :

 

-          Serait-il possible de signer les papiers pour formaliser tout cela ?

-          Bien sûr, je vous en prie suivez-moi, allons dans mon bureau.

 

Un dernier sourire à leur encontre et je fais demi-tour en direction de Monica.

 

-          Monica tu as besoin d’aide ?

 

Je me rapproche d’elle tout en voyant dans sa gestuelle qu’elle est contente que j’arrive.

 

-          Tu peux m’aider avec le matériel ? me demande-t-elle d’une voix peu sûre.

-          Pas de souci

 

Je commence à débrancher le câble VGA de l’ordinateur lorsque je sens une main se poser sur mon épaule.

 

-          Si vous avez besoin d’aide les filles je suis là.

 

Mes yeux passent de cette main et suivent le chemin de l’avant-bras puis du coude jusqu’à l’épaule. Et quand je vois son visage tout me remonte à la surface. Je retire violemment mon bras de son emprise et quelque chose éclate en moi.

 

-          NE ME TOUCHE PLUS JAMAIS, tu as compris ? Si jamais tu oses reposer ta main sur moi je te ferai vivre un enfer.

-          Oula on se calme, dit-il en levant les mains en l’air pour essayer de calmer le jeu tout en rigolant.

 

Je vois rouge.

 

-          Se calmer ? Non mais j’hallucine. Tu n’es qu’un PERVERS, un pauvre mec qui s’en prend à plus faible. SI tu penses que j’ai oublié ce qui s’est passé dans l’ascenseur…

 

Rien qu’à l’idée d’y repenser cela me dégoute mais je continue :

 

-          Reste loin de moi, reste loin de toutes les femmes en général, MALADE !!!

 

Je pars de la salle de réunion à grands pas, ne faisant pas attention aux gens que je croise ni du ton que j’avais utilisé. Une fois dans mon bureau, je claque la porte et fais les cent pas. J’arrache mon foulard du cou et le balance par terre. Je suis dans une colère monstre. Je rumine tout cela, je parle à voix haute puis je m’arrête net.

 

-          AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHH

 

Je hurle une première fois, j’ai besoin d’expulser quelque chose.

 

-          Et merde, et merde, et merde…AAAAAAAHHHHHH

 

Je manque de m’arracher la moitié des cheveux en passant mes doigts dedans pour me tenir la tête.

 

Je bouillonne, la cocotte-minute à exploser. J’ai le cœur qui bat à cent milles à l’heure dans ma poitrine, j’ai l’impression d’avoir fait un marathon. J’ai envie de retrouver le voir et lui mettre mon poing dans la figure. Est-ce que ça me ferait du bien ? Est-ce que ça me soulagerait vraiment ?

 

-          AAAHHHH

 

Je me retourne brusquement lorsque j’entends la porte de mon bureau s’ouvrir.

 

Devant moi Lucie, un air effrayé sur le visage. Elle respire fortement, certainement parce qu’elle a dû courir pour venir me voir.

 

Elle s’approche doucement mais reste encore à bonne distance. J’imagine qu’en me voyant elle doit me prendre pour une lionne en cage et elle a raison.

 

-          Hey ma belle…elle fait un pas supplémentaire…qu’est-ce qui se passe ?

 

Ma respiration redescend lorsque je l’entends me parler. Je cligne plusieurs fois des yeux et vois que les collègues me regardent à travers les baies vitrées.

 

J’essaye de lui répondre tant bien que mal :

 

-          Rien…rien….

 

Elle fait un pas supplémentaire :

 

-          Madie…

 

Elle tend une main vers moi.

 

-          Tu sais que tu peux tout me dire ?

 

J’essaye d’assimiler ce qu’elle me dit mais j’ai encore la tête embuée par ce qu’il vient de se passer. Je regarde par-dessus son épaule et vois ma chef au milieu de la porte, les bras croisés avec air peu contente sur le visage. Je sens la colère remontée en moi lorsque Lucie me dit :

 

-          Mais…qu’est-ce que tu as au cou ? elle s’approche de moi et lorsqu’elle veut poser ses doigts sur les marques je me recule avec un regard effrayé. Qu’est-ce qu’il t’a fait ?

 

Sa voix est triste et je relâche la barrière qui nous sépare. Une larme coule le long de ma joue et elle prend ça pour une acceptation. Elle s’approche de moi et vint me prendre dans ses bras. J’enlace mes bras autour de sa taille pendant qu’elle caresse mes cheveux doucement :

 

-          Chut…chut…ça va aller, je suis là.

 

Lorsque je pose ma tête contre son épaule, je regarde Madame LEGRAND une dernière fois et celle-ci à un air bizarre sur le visage ayant relâché ses bras le long du corps.

 

L’après-midi même nous sommes allées au commissariat porté plainte. Le policier a pris ma déposition pendant ce qui me semble être de longues heures interminables. Il allait demander une injonction d’éloignement au tribunal. Il m’avait conseillé de prendre du repos, de rester entouré de famille ou d’amis.

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